Ce col à 2284 m qui reste ouvert toute l’année dans les Alpes suisses

Perché à 2284 mètres d’altitude, le col du Julier se dresse comme un géant tranquille au cœur des Alpes suisses. Ce passage millénaire entre les vallées grisonnes offre une expérience cycliste d’exception, où l’histoire romaine côtoie les infrastructures modernes. Particularité rare pour un col de cette altitude : il reste ouvert toute l’année, défiant les hivers alpins grâce à l’excellence de l’ingénierie suisse. Avec ses deux versants aux caractères bien distincts, le Julier promet une aventure cycliste complète, entre défi sportif et immersion culturelle dans un paysage alpin préservé.

Le gardien des Grisons : carte d’identité d’un col d’exception

Un col, trois langues, mille ans d’histoire

Le col du Julier (Julierpass en allemand, Pass dal Güglia en romanche) trône fièrement dans le canton des Grisons, au sein de la chaîne de l’Albula. Son nom dérive du romanche « Güglia », terme local désignant simplement un col. Situé précisément à 46°28’20″N 9°43’40″E, ce passage stratégique relie la vallée de l’Albula à la prestigieuse région de l’Engadine.

Le défi technique qui attend votre vélo

Classé HC (Hors Catégorie) sur son versant nord et en 1ère catégorie sur son versant sud, le Julier présente un challenge contrasté. Le versant nord s’étire sur 36 kilomètres depuis Tiefencastel (851m) avec 1433 mètres de dénivelé positif et une pente moyenne de 4%. Son homologue sud, plus court mais plus incisif, grimpe sur 7 kilomètres depuis Silvaplana (1815m) avec 469 mètres de dénivelé et une pente moyenne de 6,7%.

Quand les Romains traçaient déjà la route

L’histoire du Julier remonte à l’Antiquité. Les Romains l’empruntaient déjà comme axe commercial et militaire stratégique. Témoins silencieux de cette époque, deux colonnes en pierre ollaire se dressent encore au sommet. Au fil des siècles, le col s’est modernisé : nouveau chemin en 1777, route moderne entre 1820 et 1826, premier col alpin suisse asphalté entre 1935 et 1940, et intégration à la route nationale N29 en 2020.

Le versant nord : une ascension progressive de caractère

De Tiefencastel à Savognin : l’échauffement parfait

Les 15 premiers kilomètres depuis Tiefencastel offrent une mise en jambes idéale avec une pente moyenne de 2,7%. Vous traverserez la spectaculaire gorge du Crap Ses, désormais domptée par un tunnel de 706 mètres construit en 1992. Cette section relativement douce permet d’admirer les premiers paysages alpins tout en préservant vos forces pour la suite.

De Savognin à Bivio : quand le sérieux commence

Entre les kilomètres 15 et 28, la pente se redresse pour atteindre 4,6% de moyenne. Vous passerez par Marmorera et son lac artificiel aux eaux turquoise, véritable joyau niché dans la vallée. Cette section intermédiaire marque la transition vers l’effort plus soutenu. Une fontaine d’eau potable à Marmorera (km 23) offre un ravitaillement bienvenu avant d’aborder Bivio.

De Bivio au sommet : le test final

Les 8 derniers kilomètres constituent le véritable juge de paix avec une pente moyenne de 5,4% et des passages à 12%. La route, large et parfaitement entretenue, serpente à travers un paysage de plus en plus minéral. L’air se raréfie progressivement, mais la récompense approche : le sommet et ses panoramas exceptionnels sur les Alpes grisonnes.

Le versant sud : court mais intense

Sept kilomètres de pure détermination

Depuis Silvaplana, le versant sud propose une ascension plus directe : 7 kilomètres à 6,7% de moyenne avec des passages frôlant les 12%. Cette approche plus franche du col offre des vues imprenables sur les lacs de l’Engadine. La route, large et parfaitement entretenue, permet de maintenir un rythme régulier malgré la pente soutenue.

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La porte d’entrée vers l’Engadine

Ce versant constitue l’accès privilégié à la prestigieuse région de l’Engadine et ses stations renommées comme St. Moritz. Les cyclistes qui apprécient les défis alpins suisses trouveront également leur bonheur sur le parcours cycliste d’Interlaken à Grindelwald. La descente vers Silvaplana, technique par endroits, exige une vigilance particulière dans les virages serrés.

L’arsenal du grimpeur : s’équiper pour conquérir le Julier

Quel vélo pour dompter les pentes grisonnes ?

Un vélo de route classique constitue le choix idéal pour affronter le Julier. La qualité exceptionnelle du revêtement sur les deux versants permet d’opter pour des pneus de 25-28 mm, offrant un bon compromis entre rendement et confort. Pour les cyclistes moins aguerris, un vélo à assistance électrique représente une alternative pertinente, particulièrement sur le long versant nord.

Le braquet idéal pour ne jamais caler

Bien que le Julier Pass soit classé HC sur son versant nord, il reste moins redoutable que le Grand Colombier et ses pentes redoutables. Un plateau compact (34 dents) associé à une cassette offrant un grand pignon de 32 dents satisfera les cyclistes confirmés. Les débutants ou ceux préférant une ascension confortable opteront pour un grand pignon de 36 dents. Maintenez une cadence entre 70 et 85 tours/minute pour préserver vos jambes.

L’équipement indispensable pour toutes les conditions

Même en été, prévoyez des vêtements adaptables (système de couches) car la météo peut changer rapidement en altitude. Un coupe-vent léger et des manchettes sont essentiels. L’éclairage avant/arrière est obligatoire pour traverser le tunnel de Crap Ses sur le versant nord. Emportez au minimum deux bidons d’eau, particulièrement en été, et un kit de réparation basique.

Stratégie d’ascension : comment optimiser votre effort

Versant nord : la gestion des ressources sur 36 kilomètres

L’ascension par le nord exige une gestion minutieuse de l’effort. Conservez environ 20% de vos ressources pour les 8 derniers kilomètres plus exigeants. Profitez des sections plus douces entre Tiefencastel et Savognin pour trouver votre rythme sans puiser dans vos réserves. Savognin (km 15) et Bivio (km 28) offrent des possibilités de ravitaillement stratégiques.

Versant sud : l’art du tempo sur 7 kilomètres

Plus court mais plus intense, le versant sud demande une approche différente. Adoptez un rythme régulier dès le départ et maintenez-le jusqu’au sommet. Évitez l’erreur classique de partir trop vite, séduit par la relative brièveté de l’ascension. Les 7 kilomètres à près de 7% de moyenne exigent une gestion constante de l’effort pour éviter l’explosion dans les derniers hectomètres.

Quand partir à l’assaut du géant ?

La période optimale s’étend de juin à septembre, avec des conditions météorologiques généralement favorables. Privilégiez un départ matinal (entre 7h et 9h) pour éviter la chaleur estivale et le trafic plus dense l’après-midi. Pour planifier efficacement votre ascension du Julier Pass dans le cadre d’un voyage plus long, consultez notre guide sur les distances idéales à parcourir en bikepacking.

Au-delà du col : un circuit de découverte complet

La boucle des merveilles grisonnes

Pour une expérience complète, envisagez la boucle de 110 km au départ de Tiefencastel. Ce circuit vous fera franchir le Julier, découvrir les lacs de l’Engadine, visiter St. Moritz, admirer le spectaculaire viaduc de Landwasser (classé UNESCO) et revenir par les impressionnantes gorges de Schyn. Comptez 5 à 7 heures selon votre niveau pour ce parcours totalisant 2033 mètres de dénivelé positif.

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Les trésors cachés le long du parcours

Au sommet, ne manquez pas les deux colonnes romaines en pierre ollaire, témoins silencieux de 2000 ans d’histoire. Pour explorer davantage la magnifique région de l’Engadine où se trouve le col du Julier, les cyclistes aventureux peuvent également s’attaquer à la Nationalpark Bike-Tour en Engadine suisse. À Silvaplana, les lacs alpins offrent un cadre idyllique pour une pause bien méritée. Le plateau d’Alp Flix, à 15 km du col, abrite une biodiversité exceptionnelle dans un cadre préservé.

Où reprendre des forces ?

Au sommet, l’Ospizio La Veduta propose une cuisine alpine réconfortante avec une vue panoramique exceptionnelle (ouvert de 8h à 18h en été). À Savognin, l’épicerie Volg (7h-19h) permet un ravitaillement complet. Pour les gourmets, le Café Hanselmann à St. Moritz (7h30-18h30) offre des pâtisseries grisonnes traditionnelles dans un cadre élégant, avec une terrasse accueillante pour les cyclistes.

Informations pratiques : l’essentiel à savoir

Où dormir avec son vélo ?

Plusieurs hébergements adaptés aux cyclistes jalonnent le parcours. À Tiefencastel, l’Hotel Albula & Julier propose un local sécurisé et des outils (120-180 CHF/nuit). À Savognin, l’Hotel Cube offre des services dédiés aux cyclistes incluant lavage et séchage d’équipement (140-200 CHF/nuit). À St. Moritz, l’Hotel Steffani propose un service complet incluant massages de récupération (180-300 CHF/nuit).

En cas de pépin mécanique

Trois ateliers vélo peuvent vous dépanner : Rad Sport Bühler à St. Moritz (9h-18h30, fermé dimanche), Bike Energy à Savognin (8h30-18h) et Bergün Bike à Bergün (9h-17h). Pour les réparations d’urgence, prévoyez un kit basique comprenant chambre à air, démonte-pneus, multi-outil et pompe.

Sécurité et conditions spécifiques

Bien que le col soit ouvert toute l’année, les conditions hivernales (novembre-avril) exigent un équipement spécifique. Le tunnel de Crap Ses (706m) sur le versant nord nécessite un éclairage efficace. En cas d’urgence, composez le 112 (urgences générales) ou le 1414 (secours en montagne REGA). Le centre médical de Savognin (+41 81 684 33 33) et l’hôpital de Samedan (+41 81 851 81 11) sont les structures médicales les plus proches.

Le Julier : une expérience alpine complète

Comme le Julier Pass, d’autres cols alpins servent de points de passage stratégiques entre pays, notamment l’impressionnant itinéraire transfrontalier VIALPS entre France et Italie. Le col du Julier offre bien plus qu’une simple ascension : c’est un voyage à travers l’histoire, les paysages et la culture des Grisons. Sa particularité d’être ouvert toute l’année en fait une destination cycliste unique dans les Alpes. Que vous choisissiez le long versant nord ou l’intense versant sud, le Julier vous récompensera par des panoramas à couper le souffle et la satisfaction d’avoir conquis l’un des cols emblématiques de Suisse.

Thibault
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1 réflexion sur “Ce col à 2284 m qui reste ouvert toute l’année dans les Alpes suisses”

  1. Anton Muller

    Merci pour cet excellent article; il manque toutefois une remarque essentielle : ce col est très encombré de véhicules (voitures, motos, camions) toute l’année. Je lui préfère le col voisin de l’Albula, également une porte sur l’Engadine, plus tranquille et plus sauvage…

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