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Entre l’Autriche et l’Italie se dresse un géant méconnu des Alpes : le Timmelsjoch. Culminant à 2509 mètres d’altitude, ce col transfrontalier offre l’une des expériences cyclistes les plus complètes des Alpes orientales. Avec ses près de 29 kilomètres d’ascension de chaque côté et des pentes atteignant 14%, le Timmelsjoch est un défi classé Hors Catégorie qui mérite sa place dans le carnet de route de tout grimpeur passionné. Préparez-vous à découvrir un col où l’histoire, l’architecture et la nature se rencontrent dans un défi vertical d’exception.
Le géant transfrontalier des Alpes de l’Ötztal
Une frontière alpine entre deux cultures
Le Timmelsjoch (en allemand) ou Passo del Rombo (en italien) marque la frontière entre le Tyrol autrichien et le Haut-Adige italien. Son nom dérive du mot rhéto-roman « tombl » signifiant colline, et sa première mention écrite remonte à 1241 sous le nom « Thymelsjoch ».
Situé dans les Alpes de l’Ötztal, ce col est un trait d’union entre deux cultures alpines distinctes, offrant une transition saisissante entre l’atmosphère germanique du Tyrol et les influences méditerranéennes du nord de l’Italie.
Un profil qui impose le respect
Avec ses 2509 mètres d’altitude, le Timmelsjoch s’impose comme l’un des cols routiers les plus élevés des Alpes orientales. Sa classification Hors Catégorie n’est pas usurpée :
- Versant nord (Autriche) : 28,7 km à 6,1% de moyenne (1759m D+)
- Versant sud (Italie) : 28,7 km à 6,2% de moyenne (1789m D+)
Ces chiffres, bien que déjà impressionnants, masquent la réalité d’une ascension qui réserve des passages nettement plus exigeants, avec des pentes maximales de 13% côté autrichien et 14% côté italien.
Une histoire façonnée par les hommes et les montagnes
De l’antique sentier muletier à la route moderne
Contrairement à de nombreux cols alpins, le Timmelsjoch a connu une histoire routière relativement récente. Pendant des siècles, seul un chemin muletier permettait de franchir ce passage, utilisé par les marchands et… les contrebandiers.
Ce n’est qu’en 1897 que fut prise la décision de construire une route moderne, mais le projet connut de nombreux retards :
- 1959 : Ouverture de la route côté autrichien (Timmelsjoch Hochalpenstrasse)
- 1968 : Achèvement complet avec l’ouverture du versant italien
Cette construction tardive explique pourquoi le Timmelsjoch est resté relativement préservé du tourisme de masse et des grandes compétitions cyclistes professionnelles.
Un col d’architecture et d’art contemporain
La modernité du Timmelsjoch se reflète dans les cinq installations architecturales qui jalonnent son parcours. Ces sculptures contemporaines, dont le remarquable « Pass Museum » au sommet, racontent l’histoire du col et offrent des points de vue spectaculaires sur les Alpes environnantes.
Inauguré en 2018 pour le 50ème anniversaire de la route complète, le Timmel Transit Museum constitue une halte culturelle fascinante au sommet, permettant de comprendre l’histoire mouvementée de ce passage alpin.
Le versant nord : l’ascension autrichienne depuis Sölden
Premier tiers : l’échauffement dans la vallée de l’Ötztal
Au départ de Sölden (1377m), les 12 premiers kilomètres offrent une mise en jambes relativement clémente avec une pente moyenne de 4,6%. Le parcours traverse des forêts de conifères et suit la vallée de l’Ötztal, offrant déjà de belles vues sur les sommets environnants.
Cette section initiale permet de trouver son rythme et d’économiser des forces pour la suite. La route, large et bien entretenue, serpente à travers plusieurs petits hameaux tyroliens pittoresques.
Section intermédiaire : quand la pente se réveille
Entre les kilomètres 12 et 21, l’ascension change radicalement de caractère. La pente moyenne grimpe à 7,2% avec des passages à 12%. C’est dans cette section que l’on traverse la station de Hochgurgl, dernier avant-poste de civilisation avant le sommet et ultime point de ravitaillement.
Les lacets se multiplient, offrant des panoramas de plus en plus impressionnants sur la vallée en contrebas. La végétation se raréfie progressivement, laissant place aux paysages alpins d’altitude.
L’assaut final : entre ciel et terre
Les 7,7 derniers kilomètres constituent le véritable juge de paix de l’ascension autrichienne. Avec une pente moyenne maintenue à 7,2% et des passages à 13% au kilomètre 25, cette section met à l’épreuve les jambes déjà fatiguées.
L’environnement devient minéral, lunaire par endroits. Les derniers lacets offrent des vues spectaculaires sur les glaciers environnants avant d’atteindre le sommet à 2509 mètres, marqué par les installations architecturales contemporaines et le musée du col.
Le versant sud : le défi italien depuis San Leonardo
La montée progressive depuis la vallée de Passiria
Au départ de San Leonardo in Passiria (689m), les 10 premiers kilomètres offrent une pente régulière autour de 5%. Cette section traverse la verdoyante vallée de Passiria, avec ses villages traditionnels sud-tyroliens et ses paysages bucoliques.
La route, plus étroite que son homologue autrichienne, serpente à travers des forêts mixtes et longe plusieurs torrents de montagne. Le dernier point d’eau se trouve à Moos in Passeier (km 8), une information cruciale à retenir.
L’intensification : quand la montagne montre les dents
Entre les kilomètres 10 et 20, la pente s’accentue significativement pour atteindre 7% de moyenne avec des passages à 12%. Les lacets se multiplient, offrant des vues panoramiques exceptionnelles sur les vallées italiennes et les Dolomites au loin.
Cette section intermédiaire est particulièrement exigeante car elle combine une pente soutenue avec une exposition potentielle au soleil, surtout en début d’après-midi. La végétation s’éclaircit progressivement pour laisser place aux alpages.
Le final impitoyable : là où se forgent les souvenirs
Les 8,7 derniers kilomètres constituent le véritable défi du versant italien. Avec une pente moyenne de 6,8% et des passages atteignant 14% au kilomètre 24, cette section finale teste la détermination des cyclistes les plus aguerris.
Le paysage devient progressivement alpin et minéral. Un tunnel précède l’arrivée au col, nécessitant un éclairage adéquat. L’effort est récompensé par l’arrivée au sommet et la vue spectaculaire sur les deux versants.
L’arsenal du grimpeur : s’équiper pour dompter le géant
Quel vélo et quels développements pour vaincre les pentes à 14% ?
Face aux pentes exigeantes du Timmelsjoch, le choix de l’équipement est crucial :
- Type de vélo : Un vélo de route léger est idéal grâce au revêtement asphalté de qualité. En cas de prévisions pluvieuses, un gravel offre plus de sécurité.
- Développements : Un compact (34-32) est fortement recommandé pour les cyclistes expérimentés. Les débutants ou cyclistes moins aguerris opteront pour un 34-36 voire plus.
- Pneus : Des pneus de 28-32 mm offrent le meilleur compromis entre confort et rendement sur cette longue ascension.
N’oubliez pas qu’avec près de 29 km d’ascension, le Timmelsjoch est une affaire d’endurance autant que de puissance. Privilégiez donc un vélo confortable et des développements permettant de maintenir une cadence régulière.
Se protéger des éléments à 2500 mètres d’altitude
À cette altitude, les conditions météorologiques peuvent changer rapidement :
- Vêtements : Adoptez l’approche multicouches avec un maillot technique, une veste légère et un imperméable compact.
- Accessoires indispensables : Gants longs, couvre-chaussures et buff sont essentiels même en été.
- Protection : Lunettes de soleil à protection UV renforcée et crème solaire haute protection (l’intensité des UV augmente de 4% tous les 300m d’altitude).
- Éclairage : Un phare avant puissant est obligatoire pour traverser les tunnels en toute sécurité.
La différence de température entre le départ et le sommet peut facilement atteindre 10-15°C, même par beau temps. Ne sous-estimez jamais ce facteur.
Stratégie d’ascension : comment dompter le Timmelsjoch
Gestion de l’effort sur 29 kilomètres d’ascension
Une ascension de cette longueur nécessite une gestion minutieuse de l’effort :
- Premier tiers : Maintenez une cadence élevée (80-90 RPM) sur les pentes modérées pour économiser vos forces.
- Section intermédiaire : Adoptez un rythme régulier et soutenable, en alternant position assise et danseuse dans les passages plus raides.
- Derniers kilomètres : Conservez 20% de vos réserves pour les 3 derniers kilomètres, souvent les plus difficiles psychologiquement.
La clé du succès réside dans la régularité et la patience. N’hésitez pas à utiliser un capteur de puissance pour maintenir un effort constant, idéalement entre 70-80% de votre FTP sur l’ensemble de l’ascension.
Ravitaillement et hydratation en haute montagne
L’altitude augmente significativement les besoins en hydratation :
- Eau : Prévoyez au minimum 2 bidons (1,5L) et identifiez les points de ravitaillement (Hochgurgl côté nord, Moos in Passeier côté sud).
- Nutrition : Consommez 60-90g de glucides par heure (1 gel ou barre toutes les 30-45 minutes).
- Électrolytes : Particulièrement importants en cas de forte chaleur pour prévenir les crampes.
Commencez à vous alimenter dès les premiers kilomètres, sans attendre la sensation de faim ou de soif. À haute altitude, ces sensations peuvent être atténuées alors que les besoins sont accrus.
La boucle parfaite : le circuit Timmelsjoch-Jaufenpass
Un circuit d’exception pour une journée mémorable
Pour les cyclistes cherchant une expérience complète, la boucle Timmelsjoch-Jaufenpass (110 km, 3289m D+) constitue l’un des plus beaux circuits des Alpes orientales :
- Départ de Sölden et ascension du Timmelsjoch par le versant nord
- Descente vers San Leonardo in Passiria
- Remontée du Jaufenpass (15,6 km à 7,2%)
- Retour vers Sölden
Cette boucle offre une immersion complète dans les paysages alpins et la diversité culturelle de cette région transfrontalière. Comptez 6 à 8 heures pour un cycliste intermédiaire, pauses comprises.
Variantes et alternatives selon votre niveau
Si la boucle complète vous semble trop ambitieuse, plusieurs alternatives s’offrent à vous :
- Circuit court : Aller-retour Timmelsjoch depuis Sölden (57,4 km, 1759m D+)
- Extension possible : Ajout du col du Kühtai depuis Ötz pour les plus téméraires (+ 40 km, + 1200m D+)
- Alternative mauvais temps : Circuit vallée de l’Ötztal jusqu’à Längenfeld (40 km, 400m D+)
Contrairement au col du Julier, un autre géant alpin à 2284m d’altitude, le Timmelsjoch n’est ouvert que de mi-juin à mi-octobre, ce qui rend chaque visite d’autant plus précieuse.
Informations pratiques essentielles
Quand partir à l’assaut du Timmelsjoch ?
La fenêtre d’opportunité pour gravir le Timmelsjoch est relativement courte :
- Saison optimale : Mi-juin à mi-septembre
- Période idéale : Juillet-août pour les meilleures conditions
- Horaires conseillés : Départ matinal (7h-9h) pour éviter les orages d’après-midi et le trafic touristique
Vérifiez toujours l’ouverture du col avant de partir, particulièrement en début et fin de saison. Les chutes de neige peuvent survenir même en été au-dessus de 2000m.
Services et hébergements adaptés aux cyclistes
Plusieurs établissements accueillent spécifiquement les cyclistes :
- Bike Hotel Sölden (Sölden) : Local sécurisé, atelier, service de lavage
- Pension Waldruhe (Hochgurgl) : Local vélos, petit-déjeuner sportif
- Albergo Passiria (San Leonardo) : Garage vélos, menus adaptés aux sportifs
Pour les réparations, vous trouverez des ateliers vélo à Sölden (Bike Republic Sölden) et à San Leonardo (Passiria Bike).
Sécurité et précautions particulières
Quelques points de vigilance spécifiques au Timmelsjoch :
- Descente du Timmelsjoch : Virages serrés, tunnel, possibilité d’animaux sur la route
- Météo : Risques d’orages fréquents en été (après-midi)
- Trafic : Modéré en été, principalement touristique, fermé aux poids lourds
- Éboulements : Vigilance particulière entre les km 22-24 du versant italien (signalements récents)
En cas d’urgence, le numéro unique européen est le 112. La couverture réseau est généralement bonne sur l’ensemble du parcours.
Un défi alpin qui mérite sa place dans votre carnet de route
Le Timmelsjoch représente l’essence même du cyclisme alpin : un défi physique exigeant, des paysages à couper le souffle et une immersion culturelle unique à la frontière de deux mondes. Contrairement aux cols mythiques surpeuplés des Alpes françaises, il offre une expérience plus authentique et préservée.
Que vous choisissiez de l’intégrer dans la boucle Timmelsjoch-Jaufenpass ou de le gravir en aller-retour, ce géant des Alpes orientales vous laissera des souvenirs impérissables. Et pour ceux qui cherchent à prolonger l’aventure, le circuit Nationalpark Bike-Tour dans l’Engadine voisine constitue une extension naturelle à quelques dizaines de kilomètres seulement.
Comme pour tout col du Granon, un autre défi alpin pour cyclistes aguerris, la conquête du Timmelsjoch ne s’improvise pas. Mais avec une préparation adéquate et les informations détaillées de cet article, vous avez toutes les cartes en main pour transformer ce défi en une victoire personnelle inoubliable.
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Très beau col, fait plusieurs fois depuis 1980….avec aussi la rude ascension du glacier de l’otztal (1400m pour 13km)